DANS LA LANGUE DES ANCIENS
Ce site destiné à tous les Cassagnards a naturellement été rédigé en Français. Il convient
de rappeler que les internautes les plus anciens auraient aussi bien pu en prendre connaissance dans cet autre moyen d'expression traditionnel
que nous appelons le « patois ».
Il s'agit d'un parler Gascon assez typé utilisé, avec
des variantes locales, dans le Comminges et le Couserans : il se rattache à l'ensemble des langues occitanes.
Pour l'utiliser, on trouvera ci-dessous quelques dictons sur le déroulement des saisons, fréquemment employés autrefois
dans la région.
Ils témoignent de l'importance accordée au calendrier et à la météorologie
pour rythmer la vie d'une collectivité vivant essentiellement des produits de la terre.
Ils seront aussi l'occasion de rendre un hommage mérité à ce qui fut la langue maternelle des multiples générations
qui nous ont précédés à Cassagne.
Le temps et ses prévisions
Etj iouer le san cap james minjatch éts arrats
Les rats n'ont jamais mangé l'hiver. (Tôt ou tard, il doit se manifester)
N'a sent Andreu, aqui que soun ca dits era nheu, se nou i soun qu'eil sérè léu
A la St-André (30 novembre), je suis là dit la neige, si je n'y suis pas, j'y serai bientôt.
En aué droumitch désempuch io bero stouno, etj ours que draouich ei gouels et
dio d'éra candelera. Sé hé betch, que s'amago éra poumo qué s'auio estaubiach e qu'ei demoro laguens éra
tuto. Sé hé machants tents, que la s'arrougagno a betch mos e qué s'en ba dansa p'ei bosques
Après avoir dormi longtemps, l'Ours ouvre les yeux le jour de la Chandeleur. S'il fait beau, il cache la pomme qu'il avait gardée
en réserve et reste dans sa tanière (l'hiver n'est pas fini et il aura encore besoin de ses provisions). S'il fait beau temps,
il la mange et s'en va danser dans les bois (l'hiver est fini).
N'a sen bincens, qu'abachon és tors é pujon es bents
A St-Vincent (22 janvier), les gelées se réduisent et les vents s'amplifient.
Et siés d'ariou et coucut cantomort ou biou
Le 6 avril, le coucou chante mort ou vivant (c'est vraiment le printemps dans nos régions).
Lio diuendrero, aigo p'éra carèro
La lune qui change le vendredi mouillera la route (elle amènera la pluie).
Abriou plougiou, é mai nou triga's
Il pleut en avril et sans arrêt en mai.
Mountanho claro, trauc de madamo éscur ploujo at ségur
Si la montagne est claire, et obscur l'horizon de St-Martory ( dit aussi « Trou de Madame »), il pleuvra à coup sûr.
Etj éilau de sen
Barnabé, sé nou ei déuant, qué i ei darré
L'averse de St-Barnabé (11 juin), précède ou suit cette date.
Aue héuré, eman candelé, sen blas i ei detras, decho passa un dio e io diato
que caigéras sus sento Agato, aueito alabets de cap a oun ban eras broumos, pramou éras périglados d'en gouanh, que
séguiran aquech camin
Aujourd'hui comme en février, demain sera la Chandeleur. Après un jour et une nuit, ce sera Ste-Agathe. Regarde alors où vont
les nuages, car les orages de cette année prendront la même direction.
Les travaux des champs et les récoltes
Sé s'escai que sio laurade jambié, n'en sera cap mès, né mars, né
heure
S'il arrive qu'on puisse labourer en janvier, ce ne sera plus le cas en mars ou février (Il est prudent de profiter de l'époque
où la terre se prête aux labours).
Sé cholous canton en heuré, pujo éts estramos en soulé
Si les crapauds chantent en février, remonte au grenier les débris de foin tombés des râteliers (Les prochaines récoltes
d'herbe seront déficitaires).
Poudo douro, poudo tart, arren nou bau éra talho dé mars
Que tu tailles tôt au tard (la vigne), rien ne vaut la taille du mois de mars.
A Nostro Damo d'éra Candelero, biro éra gouelho d'éra casalero, a Nostro Damo
de mars, réibo lo dé toutos parts
A Notre-Dame de la Chandeleur (2 février), retire les brebis des enclos proches des maisons. A Notre-Dame de mars (25 mars), retire-les
de partout. (Ces dates marquaient la fin de la période de tolérance où l'on pouvait amener paître les brebis sur les
propriétés voisines).
Bé cau que sio pla praou éra bladado n'a qué mai da dèche cabelhado
Le champ de blé est bien maigre si à la fin mai il n'a pas encore formé ses épis.
Sé plau et dio d'éra Trinitatch, et blatch s'en tourno per mentach
S'il pleut le jour de la Trinité (juin), la récolte de blé sera réduite de moitié.
En jun é julhet né henno né caulet
En juin et juillet, ni femme, ni choux. (Les travaux des champs sont trop absorbants pour que les hommes puissent s'intéresser aux
femmes ou à la table).
Nheuo, nheuo bourilhoun, qu'auen hauos en cachoun, e mounjetos en metau, nheuo, nheuo coumo cau
Tombe, tombe petit flocon, nous avons des fèves dans la caisse et des haricots dans la marmite, neige, neige comme il faut. (C'est
l'hiver mais on ne s'en soucie pas, car il y a suffisamment de réserves).
A sen Blas, pescaillous entio ét nas
A St-Blaise (3 février), des crêpes jusqu'au nez.
Quan éra gesto lourich éra hame qu'éi en pais, quan bajoquo qu'éi toco,
quan hé crico-croco, que i a pan é coco
Lorsque les genêts fleurissent (mai), la faim s'installe dans le pays. Lorsqu'ils forment la graine (juin), elle y est en plein, lorsqu'ils
craquent (juillet), il y a du pain et des gâteaux. (C'est la difficile période de soudure où les provisions de l'hiver
s'épuisaient parfois avant que ne soient engrangées les nouvelles récoltes).
ETC... ETC
E TRIC E TRAC MOUN COUNDE QU'EI ACABATCH
Les mots et expressions employés à Cassagne
Les mots et expressions cités dans les lignes suivantes n’ont pas la prétention d’être nommés «vocabulaire Cassagnard», ce sont des éléments du vocabulaire parlé qui peuvent susciter l’étonnement voire l’incompréhension chez les nouveaux habitants ou chez les touristes de passage dans notre village. Si vous en connaissez d’autres, n’hésitez surtout pas à nous les communiquer avant qu'ils ne disparaissent !
- Le Pauvre : si vous entendez parler de «ce pôvre Jojo Blanc», cela ne signifie nullement que le dénommé est dans le besoin, mais tout simplement qu’il est décédé !
- La Poche : si un Cassagnard vous recommande d’aller chercher une poche, il entend par là un sac en plastique.
- La Malle : «je vais chercher les boules dans la malle» signifie «je vais chercher les boules de pétanque dans le coffre de ma voiture».
- Répépiéjer : radoter «Ce Maurice Dou, il répépiéje un peu avec ses histoires de montagne !»
- Un Traste : il s’agit habituellement d’un véhicule, mais pourquoi pas un autre objet, qui est amorti depuis un certain temps et qui ne fait plus rêver !
- Trastéjer : de la même racine que le mot précédent, signifie s’occuper sans but précis et sans motivation.
- Mazéguer : un peu le même sens que le verbe précédent avec une idée d’acharnement sur le labeur; «j’ai pas mal mazégué pour arracher cette souche !»
- Faire Tutet : aller regarder dans un sens de curiosité un peu inquisitrice.
Toponymie Cassagnarde
Voici le sens que l’on peut donner à certains noms de lieux cassagnards, d’autres interprétations sont bien entendu possibles.
CASSAGNE : du Gaulois cassanos, via le Latin cassanus (chêne), évoque donc une ancienne chênaie défrichée qui a laissé la place à des champs et à un village de cultivateurs. Pour les Gaulois, le chêne représentait l’arbre sacré par excellence, ce qui explique peut-être qu’on ait voulu souligner sa présence dans le paysage.
L’ARIAL : du gascon, rial; ruisseau, torrent. Le «A» est le préfixe indiquant la direction. A Cassagne, l’Arial est le nom du ruisseau qui prend sa source au lavoir et qui, parallèle au chemin rural desservant les maisons du lieu-dit, mène vers le cours d’eau (Lens).
L’AROUCAOU : probablement de arricaou, ruisseau encaissé au fond d’un ravin.
BESSON : provient de bessous, jumeaux, en raison des deux maisons et des deux familles implantées à l’origine dans ce hameau.
BOUQUE-DE-LENS : embouchure du Lens qui se jette dans le Salat; cette Bouque a servi au chargement et au transport par bateaux des pierres de Belbèze et de Cassagne.
CAP-DETH-MAROT : on peut imaginer tête de bélier si on prend la traduction littérale de l’expression.
LE CASTERA : du Latin castellum puis le diminutif castellare, qui signifie camp militaire, lieu fortifié, château-fort, le castelar s’élevait en général sur un tertre ou une colline.
LES CASTETS : du Latin castellum qui a donné castet dans le sud-ouest, peut-être également un ensemble de rochers sis sur une éminence et offrant de loin, une vague ressemblance avec un ouvrage fortifié.
FOUYS : les petites fosses, les tombelles.
FURNE : du latin, furnax, four (à chaux ?), ancien vocable : Furnes.
GACHON : de l’occitan gachous, terrain boueux, marais, terrain détrempé.
HARAYPEY : du gascon arail; charrue et pey; pièce de terre, la pièce labourée.
LAS GRAVES : terrain graveleux.
LENS : du latin, lenitus, ruisseau au cours paresseux.
LUX : du latin lucius ou de Luc, on peut également penser à un espace boisé (lux/luz).
ROUAOUDE : du gascon, rou; mélange de céréales qu’on sème ensemble, orge et avoine, seigle et avoine, mélange de froment et de seigle et ada; désigne le contenu, l’étendue, la collectivité ou l’implantation.
SARRADAS : éventuellement calque du Latin serrata, vallée resserrée, en référence à la vallée du Salat, mais plus probablement dérivé de serre, le suffixe étant à sens collectif (succession de collines).
TARTE : le plateau, la terre d’en haut.
Etymologie anthroponymique Cassagnarde
Voici le sens que l’on peut donner à certains noms de famille cassagnards, d’autres interprétations sont bien entendu possibles.
ABADIE : du gascon abadia, forme méridionale du mot abbaye, ce nom est actuellement porté par 10 000 personnes, essentiellement dans le sud-ouest et particulièrement dans les Hautes-Pyrénées.
AMOUROUS : sobriquet signifiant amoureux.
ANE : ancien nom de baptême d’origine latine (asinarius), conducteur d’ânes, surnom péjoratif donné par les musulmans d’Espagne aux chrétiens (allusion à l’entrée de Jésus Christ à Jérusalem sur un âne), fréquent en Comminges et Couserans.
ANGLADE : évoque une caractéristique de la maison ou des terres; une terre en angle ou une maison à l’angle d’une rue, ce nom est porté par 5 200 personnes en France avec une implantation initiale en Aveyron, Haute-Garonne et Ariège.
ARNAL : nom typique de la Haute-Garonne qui est une variante méridionale du nom Arnaud.
ARTIGAS : terme pré-latin, artiga, désignant des terres non exploitées, landes, friches, que l’on a entrepris de défricher dans le but de les transformer en champs.
BALAGUE : du pré-latin, voire du Gaulois, balec qui signifie genêt et qui a donné Balaguier, Balaguié et probablement Balagué.
BARAT : en occitan, ruse, tromperie, ce nom aurait donc désigné à l’origine un homme fourbe.
BAROUSSE : ce patronyme désigne la localité des premiers porteurs de ce nom; région de la Barousse aux confins du Luchonnais.
BARRAU : baril en occitan, attribué à l’origine à quelqu’un qui était probablement marchand de barils.
BARTHE : prairie humide et inondable, ce nom est porté par 15 000 personnes en France, essentiellement dans le sud-ouest.
BLANC : nom très courant porté par 70 000 personnes, attribué à l’origine à quelqu’un portant des cheveux blancs, essentiellement dans le sud mais jusqu’en Bourgogne.
BORDES : ferme, métaierie, nom donné ensuite à l’habitant, il est porté par 11 000 personnes en France.
BOYE : forme régionale du mot bouvier, désignant la personne qui conduisait les boeufs.
BRINGUE : sans doute contraction de Béranger.
CANAL : du latin canalis, canal non dans le sens moderne du terme mais dans le sens de fossé d’écoulement ou de conduit aménagé amenant l’eau de source. Ce nom est porté par 4 000 personnes en France.
CASSAGNE : de casso, casse, le chêne, donc une chênaie.
CASTEX : forme gasconne de castets et donc, château (voir toponymes), nom porté actuellement par 4 100 personnes. Ce patronyme désigne l’habitant du château ou celui qui y travaillait, notamment le portier ou le garde.
CAUJOLLE : du latin, caveola, cage pour oiseaux, ce nom a donc pu désigner un fabricant de cages ou un oiseleur.
CAUBET : diminutif gascon de chauve, nom porté par 2 400 personnes en France.
CAZABET : de casa, mot latin qui désigne une maison, une petite ferme, mot que l’on retrouve d’ailleurs en espagnol et en italien moderne. Sous l’empire romain, la casa était la maison où résidait le tenancier qui exploitait tout ou partie d’une villa gallo-romaine pour le compte du propriétaire. Le suffixe bet désigne la forme adjective belle, on peut donc imaginer que ce nom a été donné au propriétaire d’une belle ferme.
CAZENAVE, CAZENEUVE : du latin casa avec l’idée en suffixe d’une maison neuve.
COUMES : du gascon coma, combe, mais qui peut aussi désigner paradoxalement une colline ou un monticule.
DANGLA : ce nom évoque la localisation de la demeure initiale, une maison à l’angle d’une rue, ce nom est porté par 550 personnes en France avec une implantation d’origine en Haute-Garonne.
DARBAS : patronyme commingeois signifiant «originaire du village d’Arbas».
DARGEIN : patronyme ariégeois, obtenu par agglutination de la préposition de et du nom du village d’Argein.
DEDIEU : en reconnaissance du don divin de la naissance, porté par 6300 personnes en France.
DELMAS : du latin mansus, maison rurale, qui a donné mas dans le midi, ce nom concerne 17 000 personnes en France, essentiellement dans le sud.
ESCAICH : patronyme ariégeois, originaire de St-Girons et Eycheil, provient probablement de l’occitan et signifie le vannier.
FEUILLERAT : évoque la localisation initiale, endroit feuillu, 780 en France, la Haute-Garonne étant un des premiers lieux d’implantation des Feuillerat.
FOURCADE : à l’origine, maison située à la bifurcation ou à la fourche d’un chemin, 9000 en France dont près de la moitié dans le sud-ouest.
GAILLARD : désignait à l’origine un homme joyeux, audacieux, nom porté par 40 000 personnes en France.
GARCIA : nom d’origine espagnole, mais par le jeu de l’immigration, porté par 86 000 personnes en France.
HERNANDEZ : d’origine hispanique, très répandu actuellement en France, porté par 21 000 personnes.
LAPEYRE : de la peyre, par agglutination de l’article au nom, provient d’une ancienne forme latine petra, pierre debout ou fichée en terre, fait référence à un mégalithe ou menhir selon l’époque (néolithique à gauloise), peut être aussi un monument funéraire, une pierre sacrée ou, plus probablement une borne marquant la limite entre deux paroisses ou marquant une distance. Nom porté par 9 400 personnes en France actuellement.
LASMARTRES : signifie littéralement le martyre.
MARTIN, MARTI : du nom de baptême, popularisé par St-Martin, évêque de Tours et évangélisateur de la Gaule, nom le plus porté en France, 268 000 personnes.
PUJOL : du mot poujol, petit puy et par extension, ceux qui habitent sur les hauteurs, 14 000 en France.
REDONNET : de l’occitan redon, rond suivi du suffixe et, l’ensemble signifiant rondelet, bien dodu, s’appliquait donc probablement à l’origine à une personne de cet aspect physique.
ROQUEFORT : du nom roca et fort, donc personnes originaires d’un des nombreux lieux de cette appellation, essentiellement dans le sud du pays.
RUMEAU : déformation de romeau, surnomme un pèlerin qui a fait le voyage jusqu’à Rome, 2 600 en France, essentiellement en Ariège et en Hautes-Pyrénées.
SAJOUS, SAJOUX : adverbe de lieu ça, et jos, dessous, qualifie la situation d’une maison. Peut également provenir de sai, jonc suivi du suffixe és donc lieu où poussent les joncs.
SALES, SALLES : de sala qui signifie à l’origine, maison rurale avec salle de réception, 9 000 en France surtout dans le sud, notamment dans l’Hérault.
SANCHEZ : d’origine espagnole, porté maintenant par 48 500 personnes en France, essentiellement dans le sud.
SICRE : du latin, siagrius, qui a donné le patronyme Sicre à 2 200 personnes en France, principalement en Ariège.
SIRGANT : patronyme de Comminges et du Couserans aux origines obscures.
SOUQUE : du gascon soca, souche, peut provenir d’une maison qui se signalerait par la présence d’une souche ou d’un terrain défriché.
SOUQUET : peut provenir de socar, cordier ou d’un diminutif de soca, souche et donc petite souche.
TEOULE : du mot occitan, teula, via le latin tegula, tuile, terre rouge.